Café Liégeois #1 : Florian "Zao" Zanatta, chercheur à l'Ulg et musicien


Le principe du Café Liégeois est simple : on rencontre autour d’un verre un(e) liégeois(e) qui a des choses à dire et/ou à montrer, pour ensuite en dresser ici son portrait. 
Pour cette première édition, on a voulu rencontrer Florian « Zao » Zanatta, un des membres fondateurs du FreaKilabala Squad, le groupe liégeois qui monte en ce moment. En effet, après avoir enflammé les Coteaux de la Citadelle et remporté le vote du public aux 24h Vélo de Louvain-la-Neuve, le collectif est maintenant en compétition pour assurer la première partie du concert de Suarez à Forest National en décembre.
A côté de ça, Florian est aussi doctorant en sciences, en biologie des organismes et écologie, et on trouvait cette sorte de double casquette scientifique et artistique plutôt intéressante… Rencontre avec un troubadour éclairé.

Fin d’après-midi, Place du Marché, Zao nous rejoint de la Gare du Palais. Il revient tout juste de sa dernière journée de travail à Gembloux, où il a collaboré sur un papier scientifique avec des ingénieurs agronomes. Ça nous permet d’engager directement la conversation sur son activité professionnelle : son doctorat en sciences à l’Université de Liège. On lui demande en quelques mots, adaptés aux non-initiés à la biologie, de nous parler de ce sur quoi il travaille.  Zao s’intéresse en fait à l’effet des changements climatiques en Europe, avec comme indicateur les bryophytes, c’est-à-dire les végétaux non vasculaires. Parmi eux, les mousses sont intéressantes à utiliser parce qu’elles sont perméable à l’air et l’humidité, et parce qu’elles se dispersent par spores à longue distance ; pour le dire autrement, les mousses sont plus sensibles au changement climatique que les plantes à fleurs, et permettent d’observer une réponse rapide et visible -personnellement, on l’écouterait bien en parler pendant des heures, tant il est passionné par son sujet.

Pourtant, son chemin n’était pas tout tracé : à vrai dire, jusqu’en master, Zao n’avait aucune idée de ce qu’il voulait faire, si ce n’est qu’il aimait ce qui était transversal et multidisciplinaire. C’est une rencontre avec l’un de ses professeurs à l’Ulg -un véritable coup de foudre professionnel et humain- qui va l’amener sur la voie du doctorat – il souligne lui-même qu’il fonctionne à l’instinct. Pour son mémoire, il se rend à Lausanne, où les chercheurs ont développé des programmes informatiques particulièrement intéressants dans l’étude des changements climatiques. C’est quelque chose de très peu appliqué en Belgique, d’ailleurs, Florian est le seul doctorant de l’Ulg à travailler là-dessus.

Pour lui, au niveau des connexions dans le milieu scientifique, l’Université de Liège est un peu à la traîne, mais c’est plus une question relationnelle et politique qu’autre chose. Il y a une réelle volonté de s’affirmer, et Florian reconnaît que l’encadrement des doctorants en Wallonie et à Liège est plutôt chouette (par exemple, avec l’organisation des Doc’cafés). En quelques mots, l’Ulg commence tard mais le fait bien.

Difficile de parler d’écologie et de Liège sans dévier sur le « réchauffement climatique ». Ce sujet, terme marketing s’il en est, est à prendre avec des pincettes (Florian nous a d’ailleurs appris que le changement d’affection du sol a pour l’instant plus d’impact que le réchauffement climatique en tant que tel). L’écologie politique et la réalité de l’écologie scientifique sont deux choses distinctes, et la vulgarisation est une étape essentielle. Pour Zao, il n’y a pas tellement de volonté écologique dans le socialisme liégeois, et la population ambiante n’en a pas grand chose à faire. Hormis, comme il les décrit si bien, certaines « micro populations avec des refuges climatiques »… Pierreuse, notamment. 
Dès qu’on commence à parler de Pierreuse et de son tissu associatif, Zao s’emballe : pour lui, c’est une véritable mine d’or de dynamisme et d’initiatives citoyennes. Florian adore communiquer et ça se sent. C’est par les rencontres qu’il s’enrichit, et cela d’autant plus lorsqu’il confronte ses idées à celles d’individus issus de formations différentes, mais animés par la même volonté de faire bouger les choses. A son sens, l’éco-conscience doit s’étudier non pas du côté politique, mais du côté de l’associatif. Pour Florian, cela se fait notamment grâce à des projets alternatifs comme ceux proposés par la Ceinture Aliment-Terre Liégeoise, la Coopérative Ardente, Liège en Transition, …(sans aucun doute, une piste à explorer dans un prochain article!).

Le sentiment qu’on partage avec Zao, c’est que Liège est une ville un peu rouillée, et que la volonté de se bouger et de faire bouger les choses devra passer outre les canaux officiels. Ce qui est typiquement liégeois, c’est de partir de rien pour créer tout. Et selon Zao ça se remarque à différents niveaux, que ce soit sociétal, environnemental, ou culturel –avec des institutions qui motivent et qui proposent des initiatives originales et liégeoises, aux Grignoux et au Chiroux notamment.

Justement, le culturel, à Liège, ça le concerne directement. On l’a dit, si la vie de Zao est animée par la recherche scientifique, elle l’est aussi par la musique. Il y a 5 ans, il crée avec un binôme, Guiz, le collectif Freakilabala Squad. Chacun de leur côté, Guiz et Zao font de la musique et se réunissent pour des séances d’impro plutôt expérimentale, dans un brassage de genres qui fait leur originalité. Avec le temps, une véritable émulation s’opère et le collectif évolue. Influencé principalement par le reggae et le funk, le Freakilabala, c’est un groupe de potes très liés qui s’est retrouvé pour faire ensemble des projets communs et se stimuler les uns les autres dans différents domaines artistiques (poésie, peinture, musique, arts plastique…). En ce moment, Zao et son groupe essaient de lancer Freekivision, un collectif audiovisuel et artistique, pluridisciplinaire et ouvert, qui transformerait leurs concerts en véritables petites comédies musicales. Petit bijou de débrouille collective, «Madame Love» est la première création à s’inscrire véritablement dans ce projet. Au-delà de la réalisation du clip vidéo, cela a été une véritable expérience (un petit making-off en donne un aperçu).

En quelques mots, le Freakilabala, c’est du spontané, du pluridisciplinaire, du réseau, de la débrouille. Mais c’est aussi de l’énergie positive, le ki (dérivé de la notion spirituelle extrême-orientale), et du freak, du bizarre – le côté surréaliste liégeois. Et c’est donc quelque chose qui n’aurait peut être pas pu voir le jour ailleurs que dans la Cité Ardente.

Parce que, si Florian reconnaît qu’il se verrait bien vivre ailleurs, de cœur, il est liégeois. C’est notamment le grain de folie de notre ville qui l’a fait décliner une proposition de doctorat à Lausanne ; ça et toutes les attaches qu’il a ici. Pour Zao, le côté festif, spontané et chaleureux de Liège prend clairement le pas sur la réputation d’insécurité de la ville. Mais il ne faut pas nier cette facette : c’est aussi ce qui fait sa particularité. Florian décrit Liège comme une « ville postindustrielle mal recyclée », et on est plutôt d’accord avec lui. Et pourtant, il y a du potentiel, que ce soit grâce au bon capital de surréalisme belge à cultiver, ou encore grâce à toutes les initiatives collectives et libres.

Zao n’est peut-être pas (encore) célèbre, mais à nos yeux, il est l’incarnation parfaite du liégeois débrouillard, souriant et sociable. On a voulu le rencontrer pour parler de ses deux activités, qui semblaient diamétralement opposées, et c’est finalement l’impression d’une grande cohésion qui en est ressortie. On est reparties, délestées des quelques euros de l’addition, mais définitivement enrichies par cette discussion. Et chez Boulettes à la liégeoise, on ne doute pas une seule seconde qu’il en ira de même pour les prochains Café Liégeois.

Les bonnes adresses de Zao :

• La rue Pierreuse : Tout un microcosme associatif qui bouge et qui fait bouger les choses s’y réunit ; l’ASBL Barricade, la Coopérative Ardente, la Casa Nicaragua – aussi bien pour les activités présentées que pour sortir. Lieux de rencontres, riches en projets et initiatives.

La Supérette : Pour les soirées. Autre concrétisation originale et sans institution d’une volonté de potes, que Zao encourage forcément.

• Le Pot au Lait : Toujours pour sortir, le célèbre café demeure « la capitale du freak depuis des générations » pour aller boire un verre.


L’actualité du FreaKilabala Squad :

Vous pouvez les retrouver sur leur page facebook, et regarder leurs vidéos sur leur compte youtube.
Jusqu’au 2 novembre, vous pouvez voter pour eux dans le cadre du concours PureFM afin de leur permettre d’assurer la première partie du concert de Suarez : c’est par ici.




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