Pourquoi il faut galoper voir "Three Billboards outside Ebbing, Missouri" au ciné



« Three Billboards outside Ebbing, Missouri » : pas le genre de titre qu’on aime prononcer à l’ouvreuse. Sauf que c’est vraiment le film que j’ai envie de citer ces derniers jours quand on me demande ce qu’il y a de bien au cinéma. Alors plutôt que de l’épeler sous les toits, je l’écris ici : il faut voir Three Billboards outside Ebbing, Missouri. 

Le réalisateur anglais de Bon baisers de Bruges  (et 7 Psychopathes mais ça on ne le dit pas trop fort), revient en force avec un film grandiose.  Three Billboards raconte l’histoire d’une mère qui face au crime non résolu de sa fille « violée alors qu’elle agonisait » cherche justice tout en penchant pour la vengeance. C’est l’histoire d’une petite ville de l’Amérique profonde. D’un flic tordu. D’un autre perdu. Ce n’est pas un polar, il n’en prend que l’apparence. C’est un film de personnages vivant dans une époque qui part en vrille, avec son lot de racismes, de violence, d’injustices et de mélancolie. Cette société c’est la nôtre et tout ceux qui y vivent seront concernés par ce film.


Pour camper la protagoniste : Frances McDormand. Préparez-vous car elle en jette. L’actrice n’est pas seulement l’épouse de Joël Coen, c’est avant tout une reine, une magnifique reine, je dirais même un « cowboy du cinéma » ! Le film a d’ailleurs des allures de Western seventies. C’est réjouissant. Three Bilboard n’est pas non plus le petit frère des films des frères Coen comme on a pu nous le faire croire mais plutôt un cousin. Oui, le réalisateur est bel et bien touché par la grâce tragicomique des Coen mais il a son propre style (humour noir, dépression, portrait juste et trublions) et se hisse au même niveau que celui des frangins multi-primés. Je souligne ici les dialogues délectant et piquants de Martin McDonagh qui avant d’être réalisateur est un auteur hors pair. Son scénario comme la construction des personnages s’éloignent à tout prix du manichéisme. Pas de gentil, ni de méchant. Pas de crime résolu d’ailleurs… C’est un film qui s’intéresse plus aux personnalités qui l’habitent plutôt qu’à l’intrigue qu’il installe. Si Three Bilboards ressemble à priori à un film policier, plusieurs moments clés lancent le spectateur sur de toutes autres pistes. C’est brillant.

Plus le fil se dénoue, plus le tragique prend le dessus. Ce mélange de cynisme et de noirceur m’a plongée dans un état triste. On a tous nos lots de déprimes mais ce gros cafard de dimanche, cette affliction, ne venaient pas de moi mais bien de la société dans laquelle je vis et celle que je découvre chaque jour dans la presse. C’est rare cet effet produit par un seul film sur le spectateur : la sensation de faire partie d’un tout et d’en ressentir les turpitudes car on est concerné par ce tout, de près et de loin. Mais le tableau dressé par Three Billboards n’est pas tout à fait noir. Au contraire. Plus haut je vous parlais de manichéisme, il n’y en a pas ici. Cette zone grise que propose le réalisateur apporte une bonne dose d’espoir. Cette grisaille c’est la complexité des caractères, de ces personnages qui frappent, qui se blessent, qui déplorent, qui s’améliorent,… Pas de gentil, ni de méchant. Seulement des êtres-humains fardés de leur bagage émotionnel nébuleux. Le film nous donne espoir en l'humanité, confiance en l’autre et en nous. Ils vous font ricaner ces grands mots « humanité » et « espoir » ?  Si vous souriez : alors tant mieux.




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