Vous connaissez cette blague : vous venez de
voir le nouveau Spielberg et vous dites « Super
ce film, ce réalisateur gagne décidément à être connu !» C’est une blaguounette qui me plait. Eh bien ça m’est arrivé pour du
vrai. C’est-à-dire pas pour rire. Autant dire, la te-hon pour une critique
cinéma aussi célèbre que moi.
Je venais
de voir L’autre côté de l’espoir en
vision de presse quand je croise un ami et lui parle de ce film parfait.
Lui :
Et c’est de qui ?
Moi :
Je ne sais pas, un jeune réal finlandais, c’est son premier film je crois.
Lui :
Tiens, il y a justement le nouveau Kaurismäki
qui sort bientôt.
[Silence]
La pièce tombe. Je ne connais pas ce Kaurismäki. Or, c’est un peu le Spielberg
de la Finlande et je viens de découvrir son 17ème film. Moment
gênant, donc. Le film parait-il sera le dernier du cinéaste, je pourrai ainsi
me faire sa filmographie comme je l’ai commencée : à l’envers. Une chance
finalement.
Cette
anecdote peut être vue comme la preuve de mon objectivité. En effet, j’ai vu un
Kaurismäki sans savoir que c’était un Kaurismäki - ni qu’existait d’ailleurs
Kaurismäki - et je l’ai trouvé aussi génialissime qu’un Kaurismäki tout ça en
pensant voir un premier film d’auteur, finlandais qui plus est, voué à me
donner le cafard.
Pourquoi ce film est parfait ? Parce qu’il
est drôle, très très drôle et son sujet est triste, très très triste.
D’abord, il
y a Khaleb. Un jeune syrien qui fuit la guerre avec sa sœur, dans l’espoir de
survivre et, pourquoi pas, de vivre. Ce qu’il trouve de « l’autre
côté de l’espoir », c’est la réalité. Cette réalité, elle est cruelle
(la nature humaine peut se borner de manière impressionnante à la pourriture)
mais il faut vivre avec, avec ses bons côtés et son lot d’optimisme. Ensuite,
il y’a Wikhström, la soixantaine. Ce Finlandais comme il faut, sans histoire, quitte
sa femme alcoolique pour racheter un restaurant miteux et avec lui ses employés
amollis mais ô combien comiques. Ces deux là vont se rencontrer et l’un va
donner à l’autre un sérieux coup de pouce.
Je ne sais
pas si Kaurismäki a lui-même accueilli une famille de réfugiés syriens ni s’il
est bénévole à la soupe populaire. Est-il un meilleur homme que les autres, est-il
plus humain ? Ça non plus je n’en sais rien. Ce dont je suis sûre : L’autre côté de l’espoir est une œuvre humaniste.
Sans faire semblant de ne pas y toucher, Kaurismäki ne donne pas de leçon, non,
mais il donne son point de vue. Qui est le même que le mien et j’espère
que le vôtre : le « réfugié » n’est pas par définition un
criminel, ni un profiteur, ni un chien aux abois. Il n’est pas là non plus pour
violer nos femmes ni voler nos voitures. Ce point de vue, Kaurismäki le donne avec
autant de froideur que d’empathie. Avec autant de poésie que de réalisme.
Du peu que
j’en ai vu, l’univers de Kaurismäki est : un humour pince-sans-rire, du
burlesque, du second degré, des dialogues caustiques, une mise en scène
millimétrée, singulièrement composée… Jouant sur le détail et les comiques de
situation, ce cinéaste fait rire, subtilement, par un humour non pas explosif
mais incisif. Bref, je vous le dis, il gagne à être connu ce mec là !
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