Politique et pékèt : l'interview barquette de Carine Clotuche


Conseiller Clotuche. A l'oreille, le nom sonne comme un patronyme à la De Funès, tout droit sorti d'un film des gendarmes. Et pourtant, ne cherchez pas. Devant les Firket, Greoli et autres Drèze, c'est bien Carine Clotuche qui est depuis peu la figure de proue des Humanistes liégeois. Un choix audacieux pour un parti en quête de sens ? Rien de tel qu'une barquette pour en avoir le coeur net.

Entre la stratégie du renouvellement - place aux jeunes ! - et de l'anonymat l'ouverture, les listes citoyennes non-estampilées, rien nirait-il plus au cdH ? A Liège, on garde bel et bien l'acronyme du parti pour les communales, mais la liste n'échappe pas à la tendance : sur les quinze premières places, dix sont occupées par de nouveaux candidats, et huit ont moins de 35 ans. Et pour ce qui est de Carine Clotuche, la tête de liste, si elle occupe un siège au Conseil suite au décès de Jacques Marneffe, elle avait obtenu 624 voix aux dernières élections …

La stratégie a beau avoir été validée en interne, je brûle d'en apprendre plus sur les choix du parti. Pour débuter l'interview, je nous sers donc le pékèt framboise qu'a choisi mon invitée (plus d'info sur le concept de l'interview barquette ici).

La stratégie du renouveau sur la liste, est-ce un choix de coeur ou un choix par défaut ?

C'est vrai qu'une série de mandataires sont anciens et que se pose aujourd'hui la question du renouvellement de la liste, mais la stratégie s'explique avant tout par un double choix assumé : s'ouvrir aux jeunes et s'ouvrir à des personnalités plus nouvelles en politique. En cela, on peut bel et bien parler d'un double mouvement de renouveau.

En ce qui concerne les jeunes, on a résolument décidé de les mettre en bonne position sur la liste, car c'est la seule façon de s'assurer qu'ils soient élus. Mais nous n'avons pas non plus que des  jeunes. Intégrer également des personnalités nouvelles en politique, ça ne veut pas dire sans expérience. C'est plutôt l'assurance d'un regard différent sur la façon de faire de la politique.  C'est un choix discuté en interne avec le comité des sages et approuve à la "quasi" unanimité. Les ancien comme Michel Firket, Benoit Drèze, Alda Greoli ou Michel de Lamotte viennent eux soutenir la liste.
C'est un défi. On va voir si les Liégeois vont suivre. 
Pour cela, il faut expliquer et convaincre. Il faut faire comprendre qu'il faut faire de la place aux jeunes. En me mettant moi en tête de liste, une femme, c'est aussi une évidence de cette volonté d'ouverture.

Ouverture et renouveau des personnes, oui, mais qu'en est-il du renouveau des idées ? Historiquement, les humanistes sont plutôt rangés du côté des conservateurs. Pour en avoir le coeur net, je tends à Carine Clotuche un pékèt nature et lui pose une question sur la ville.

200.000 visages pour oser Liège, c'est votre slogan de campagne. Qu'entendez-vous par là ?

Les 200.000 visages, ce sont les Liégeois, tandis que le fait d'oser fait référence au renouveau de la liste. Cette nouveauté, nous l'avons aussi orientée autour de treize idées phares, dont la mobilité, qui me tient particulièrement à coeur en raison de la saturation de la ville aux heures de pointe. 
Beaucoup de projets ont déjà été mis en route. Notre volonté est de les poursuivre.
C'est le cas notamment des initiatives en termes de mobilité douce. Pour l'instant, c'est encore trop souvent le tout à la voiture qui domine, mais il faut avancer vers des solutions comme les corridors à vélos. Nous avions un subside que nous avons prolongé et on prévoit la suite du projet dans notre programme. Nous devons nous doter des outils adéquats. Le tram va permettre de restructurer tout cela, du réseau TEC aux pistes cyclables.

Mais la mobilité n'est qu'un des treize idées abordées dans notre programme. Il s'agit de réinventer, mais pas uniquement. Nous voulons oser aussi, en ce compris la continuité. 
Oser, c'est parfois dire : "on assume nos choix et on continue"

Au programme, on l'aura compris, pas de révolution, même si des évolutions sont possibles. Pour 2018, le renouveau s'incarne avant tout dans le casting. Comme disait Jean Monnet, rien n'est possible sans les hommes; rien n'est durable sans les institutions. Mais qu'arrive-t-il lorsque  ce sont les femmes qui s'en prennent aux institutions ? On se rappelle le tohu-bohu qu'avait provoqué chez les démocrates-chrétiens la sortie de rang d'Alda Greoli qui plaidait en faveur d'une sortie complète de l'IVG du code pénal. Et Carine Clotuche, qu'en pense-t-elle ? Allez hop, un pékèt violette et une question personnelle. 

Faut-il selon vous sortir l'avortement du code pénal ?

Vous allez me mettre à mal avec mon parti (rires)... A titre personnel et en tant que femme, je pense qu'une grossesse doit être voulue. Dans le code pénal, certaines choses sont prévues, mais je pense qu'il y a une grande hypocrisie. Dès le moment où une grossesse n'est pas désirée,  on peut de toute façon se rendre dans des pays voisins où c'est légal. 
Poursuivre une grossesse qui n'est pas voulue, ce n'est pas une solution.
Mais le fait même que l'avortement relève du pénal, symboliquement, c'est très fort ...

Oui, c'est très fort. Mais en pratique, les sanctions sont elles véritablement poursuivies ? Je ne sais pas. Dans tous les cas, c'est un peu hypocrite. Je préférerais de la clarté. Je suis maman de trois enfants et la famille est quelque chose d'important à mes yeux, mais une grosses non-désirée, qui plus est dans une situation difficile, ce n'est pas la solution. Même s'il est en parallèle important de responsabiliser les gens. Ce n'est pas une décision qui doit se prendre à la légère, car il y a des conséquences.



Alors que je commence à mieux cerner mon interlocutrice, je me rends compte que je ne sais toujours pas grand chose sur ses goûts et ses couleurs, si ce n'est qu'elle habite le haut de la rue de Campine, ce qui constitue en soi un excellent choix, puisque j'y ai grandi. Pour en apprendre davantage, je nous sers à tous les deux un pékèt melon. 

Imaginons qu'une amie del étranger vienne vous rendre visite à Liège. Quels sont les trois incontournables que vous mourrez d'envie de lui présenter ?

Je dirais tout d'abord les Coteaux de la citadelle, car beaucoup de gens n'imagine pas toujours tout ce que la ville à d'espaces verts à offrir. Il y a aussi la ferme de la vache et le Tiers à Liège. Pour terminer la balade, je me rendrais à la brasserie C pour boire un verre. 
J'irais ensuite boire un verre Place du Marché, même si je n'ai pas un endroit spécifique à recommander. C'est surtout pour l'ambiance. Cela exprime tout à fait le côté convivial de Liège.
Enfin, nous irions manger un morceau au sabot d'Hélène. J'aime bien manger et avec les pierrades, je prends du plaisir. Puis c'est une institution, le cadre est typique et l'ambiance chaleureuse.

L'interview touche à sa fin et à l'approche de la fête des fous, c'est tout le quartier Sainte-Wallburge qui est en ébullition. Reste à tester le grain de folie de Corine, et voir si elle a pu s'intégrer aux couleurs de son quartier. L'occasion rêvée pour un pékèt caraïbes.

Vendredi, vous gagnez 30.000.000€ à la loterie. Vous en faites quoi ?

Je ne suis pas quelqu'un de vraiment intéressé par l'argent. Je l'investirais dans des projets, mais quels projets ? Laissez-moi réfléchir... Je travaille dans le social comme juriste syndicale, donc je voudrais aider les gens qui ont du mal à s'en sortir. Ceux qui n'arrivent pas à rebondir sur le marché de l'emploi. Il y a chez nous trop de pauvreté et même si le CPAS fait ce qu'il peut, ça ne suffit pas.
J'aiderais des gens qui ont des projets porteurs d'avenir. D
J'aiderais par exemple les jeunes qui veulent se lancer et qui trouvent des solutions pour la ville et l'environnement. Mais ça ne serait pas juste donner de l'argent, ce serait véritablement de l'accompagnement via des projets. Par exemples, en aidant ceux qui possèdent des compétences, mais qui ne peuvent pas les valoriser faute de diplôme.

Même pas de petit caprice ? 

Je n'arrêterais pas de travailler, car c'est la santé, mais je prendrais sans doute du temps pour ma famille et je souhaiterais faire profiter les gens autour de moi. J'aurais sans doute envie de partager. Du reste, je suis bien comme je suis.

Ni yacht de luxe, ni voiture de sport... niveau grain de folie, on l'aura compris, rien de bien outrancier. L'originalité, Carine la garderait-elle pour sa campagne ? C'est du moins l'ambition de son opération "Tour de Liège avec Carine" où elle invite les électeurs à venir courir à ses côtés chaque mardi, à la découverte d'un quartier de Liège et d'une thématique de son programme.


Les pekets consommés durant l'interview sont fournis à titre gracieux par Patrick Constant, aux commandes de la distillerie de l’Espérance commerciale, qui fabrique à Montegnée le peket depuis plus de 180 ans, qu’il soit traditionnel ou remis au goût du jour. Loin d'encourager l'abus d'alcool sous quelque forme, l'interview barquette est prétexte à un moment de convivialité... et les interviewés ne sont nullement obligés de boire tous leurs pekets. 

Texte & photos : Clément





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