C’est par une de mes meilleures amies que j’ai entendu parler du très beau projet de Tania, qui travaille avec les « enfants des rues », comme on les appelle, à Buenos Aires. J’ai directement été impressionnée par cette jeune psychologue qui s’est un jour envolée de Liège pour débarquer à la Fondation C.A.D.E.N.A en Argentine, et se consacrer corps et âme à y aider les jeunes en difficulté. Autant dire qu’elle en est revenue changée, et doublement motivée.
Le projet actuel ? Réunir assez de fonds pour construire un véritable toit au local multidisciplinaire qui accueillera les jeunes, dans la favela Puerta de Hierro à Buenos Aires. Le nombre croissant d’enfants sollicitant l’aide de la fondation implique une réorganisation de leurs locaux, ce qui a poussé Tania à participer à la mise en place d’une collecte Ulule.
J’ai voulu lui poser quelques questions afin d’en apprendre plus sur son expérience et son projet.
Pendant mes études, j’ai été sensibilisée à l’humanitaire et à ses aspects parfois problématiques, dont ce que j’ai envie d’appeler « l’effet poudre aux yeux ». C’est justement ce à quoi Tania a été confrontée, lors de son premier volontariat en Amérique Latine, et qui est typique « des organisations à qui tu dois payer une fortune, afin qu’ils t'envoient sur place pour y faire quelques heures pour te donner bonne conscience et ensuite profiter de tes vacances. Ce n'était pas ce que je cherchais ». Retour en Belgique.
Diplômée il y a 2 ans en psychologie de la délinquance, Tania est passionnée : à l’époque, elle veut aider les jeunes à l’aide de la musique. Elle trouve du travail et suit des détenus de la prison de Lantin et, en parallèle, effectue bénévolement un stage d’expression dans une maison de jeunesse. « J'y ai également fait venir des jeunes de l'ippj de Fraipont. C'était un atelier d'expression à l'aide d'une aide transitoire, le rap, permettant aux jeunes l'expression de soi et un sentiment de valorisation. Alix qui connaissait bien plus la culture du rap que moi m'a aidé » : Alix lui présente ensuite Ferdinand, coordinateur de la C.A.D.E.N.A, et l’aventure commence.
« Todo para los ninos » est le slogan de la fondation C.A.D.E.N.A qui s’est donné pour mission, depuis plus de 20 ans, de « prévenir, de promouvoir et de défendre les droits des enfants en situation de risque ». Pour Tania, c’est vraiment de cela dont il s’agit : « Tu apprends et tu en viens à vouloir "aider même si ca fait mal", sans rien attendre en retour ».
La Fondation est mise en place par des locaux argentins, et ouvre son centre de jour aux enfants délaissés, dont les droits fondamentaux sont bien souvent peu respectés.
Dans ce quartier précaire dont les infrastructures sont réduites au strict minimum, contextes familiaux difficiles, insécurité, violence et drogue omniprésente sont autant d’éléments avec lesquels ces préadolescents et adolescents doivent composer. Il s’agit de proposer « un lieu de confiance, d'expression, de liberté, de soutien à l'apprentissage, de réflexion, de valorisation, d'écoute et d'ouverture d'esprit » où les enfants peuvent se réaliser autrement qu’en existant dans la rue. D’autant plus qu’à cette période cruciale, la rue se présente comme le lieu où « les jeunes auxquels nous sommes confrontés, en grand décrochage scolaire, abandonnés par la société, les parents, le quartier, tentent de trouver un statut, une importance là où ils peuvent ».
Concrètement, Tania et ses collègues proposent un accompagnement qui correspond à chaque tranche d’âge. En premier lieu, une alimentation équilibrée pour des jeunes qui ont souvent faim, un travail sur l’hygiène et toute une série d’ateliers : bricolages, musique, entrainement de foot, cuisine, danse, écriture, et même entretien d’un petit potager et d’une serre, ainsi qu’un atelier de menuiserie (dont les meubles construits peuvent être emportés). Certains s’occupent aussi d’oies, de poules et d’un cheval. Le tout dans le soucis de « favoriser leurs sentiments d'appartenance et de valorisation ».
Voilà ce à quoi Tania s’échine, ce qui n’est pas toujours simple, mais qui lui apporte peut-être encore plus que ce qu’elle ne donne. Car ne rien attendre en retour ne signifie pas que les volontaires n’en retirent rien, bien au contraire :
Ca m’a apporté beaucoup à plein de niveaux. La vie là-bas est complètement différente d’ici, loin des préoccupations superficielles. Au final tu peux être toi-même véritablement, simplement, et t'épanouir. Au contact avec les enfants, tu apprends une multitude de choses au quotidien, tous les jours. Ils sont impressionnants. Beaucoup sont en souffrance, abandonnés et en combat continuel, mais avec une force incroyable... Un jeune homme de 16 ans vivant dans la maison (qui n’est même pas une maison) la plus précaire et dans le pavillon le plus dangereux de la favela, va s'inscrire à l'université. Ils vivent à 10 dans un 3 pièces. Il vient tous les jours à la fondation pour étudier, se documenter, nous aider, faire du sport sans relâche, fait preuve de reconnaissance et tout cela en défendant ses idées, ses valeurs...
Petit à petit, une relation de confiance s’établit entre les volontaires et les enfants, avec affection parfois, malgré de nombreux troubles de l’attachement. « C’est à nous d'adapter notre intervention et de répondre à la demande, en fonction du fonctionnement de chacun ».
Il reste 20 jours de collecte, et l’objectif est loin d’être atteint. Chacun peut y contribuer à partir de 5 (tout petits) euros. Ce qui représente, disons, un sandwich ou un verre en ville. C'est bien peu de chose que de troquer une miette de mon confort pour donner un coup de pouce à Tania et à ceux qui en ont bien plus besoin que moi.
Que vous soyez entré en période de l’Avent avec l’envie d’aider votre prochain avant Noël, que vous souhaitiez laver votre karma à moindre coût, ou que, tout simplement, vous vous sentiez d’humeur généreuse… Je ne saurais que trop vous encourager à aider Tania dans sa quête : c’est par ici !
// Toutes les photos sont de Tania.
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