Création(s) féminine(s) : le festival Voix de Femmes lève le camp


Faites le test : prenez n’importe quelle affiche de festival, musical ou pas, comptez les artistes femmes programmées, puis comparez au nombre d’hommes. On prend les paris sur un chiffre dérisoire ? Des grands rendez-vous ciné aux évènements de bande-dessinée, on en entend de plus en plus parler : où sont les femmes dans le milieu artistique ? Elles sont partout et pourtant, si peu visibles. Il n’y a pas de secret, si elles prennent moins de place dans les programmations culturelles, ce n’est certainement (évidemment !) pas par manque de talent, mais plutôt dû aux relents sexistes, parfois même inconscients, d’une société qui en est encore bien gangrénée.

Pour contrer cette déplorable sous-représentation féminine, il existe heureusement des initiatives plus que salutaires. Qui en plus de lutter à leur échelle, parviennent à nous faire découvrir des artistes exceptionnelles venues de tous les horizons. Et c’est avec beaucoup de fierté qu’à Liège, on peut compter sur le festival Voix de Femmes pour proposer un rendez-vous qui réussit ce pari avec brio.

En 2017, Voix de Femmes lève le camp

Depuis 1991, le festival Voix de Femme met la création féminine à l'honneur, faisant la part belle à la musique et aux arts scéniques, et avec un désir avoué de célébrer la diversité, dans les origines des artistes comme dans l’entrelacement des disciplines.
Aux manettes pour cette treizième édition, Flo Vandenberghe et Camille Lefèvre, les deux nouvelles co-directrices bien décidées à faire souffler un vent nouveau sur l’événement, tout en conservant son âme première.
Cette année, Voix de Femmes lève donc le camp. Alors qu’auparavant il occupait traditionnellement la Caserne Fonck le temps d’un week-end culturel et festif, le festival se déploie désormais dans toute la ville – et pendant pas moins de deux semaines. 

Du 16 au 29 octobre, de Livre aux Trésors au KulturA., en passant par le Reflektor et PointCulture, c’est dans toutes sortes de lieux culturels liégeois que les artistes s’établiront. Quelques évènements ont aussi lieu un peu plus loin, à Gand. En investissant plus de lieux, et de plus petite taille, l'idée est aussi de favoriser une proximité entre le public et les artistes dans une ambiance parfois intimiste. Et par là, d'encourager un engagement et une participation active notamment lors de workshops et ateliers de création.


Autre nouveauté : cette année, le festival se dote d’une identité graphique forte, toute en rondeurs et couleurs, avec les beaux motifs de Cécile Barraud de Lagerie, une talentueuse illustratrice bruxelloise. Désormais et pour le plus grand plaisir de nos mirettes, à chaque édition, une artiste sera mise en avant et chargée d’habiller Voix de Femmes.

Par des femmes, pour (vraiment) tout le monde

Un festival réalisé par toutes sortes de filles, pour toutes les filles, et pour les autres aussi. Car s'il est résolument engagé et propose une affiche non-mixte, il est ouvert à tout le monde… et est même très accueillant. Comme les organisatrices aiment à le rappeler :  « Tout le monde peut venir, mais juste pas sur scène » !
Et pour rendre accessibles les découvertes culturelles, les tarifs proposés sont soit très bon marché (toujours moins de 20€), soit à prix libre : pas besoin alors d'avoir un budget illimité pour se laisser porter d'une activité à l'autre.

Musique, théâtre ou arts numériques : une programmation éclectique

Audacieuse, la programmation fait se croiser des artistes de tous bords. « Une des lignes de programmation, c’est de mettre en avant des projets qui flirtent avec les disciplines », souligne Flo. Ici, la musique sera visuelle, le textile numérique et la littérature bavarde.
 
Une place de choix est réservée aux concerts, forcément, avec des artistes talentueuses. Des artistes décalées, aussi. De l’intriguant, comme l’envoûtante Juana Molina venue d’Argentine,  au plus brut de décoffrage, comme le duo rockeuses anglaises de Rattle qui dégomment joliment leurs deux batteries :
On essaie de dépasser cette idée de chanteuses à voix, de divas. Notamment en mettant l’accent sur les artistes instrumentistes. Le concert de Marisa Anderson & Asmâa Hamzaoui en est un bon exemple : il s’agit de deux oiseaux rares qui font des choses radicalement différentes à deux points opposés du globe, de la guitare américaine traditionnelle au guembri, un instrument des musiques sacrées du Maroc. Elles seront réunies pour une soirée autour de leur virtuosité pour les instruments à cordes.

Cet aspect expérimental, on le retrouve aussi du côté des arts numériques qui s’imposent comme une des découvertes majeures du festival. Avec Antennes Textiles, l'artiste bruxelloise Claire Williams propose une récupération d'objets électroniques à travers des techniques textiles, dont les résultats seront exposés ensuite. Ou encore avec un atelier autour de Wikipédia, dans une perspective féministe. C'est qu'en plus de proposer des soirées festives, Voix de Femmes laisse aussi la porte ouverte aux prises de paroles militantes : empowerment au programme avec du coaching scénique et un micro ouvert de slam, ou encore une rencontre autour de la santé mentale dans la société avec l'Autre Lieu, invité par la compagnie Paulette Godart.

Bref, une programmation qui donne le tournis, tant elle foisonne de belles idées.
Du coup, en guise de mise-en-bouche, une petite sélection très subjective d’évènements à ne surtout pas louper :

1. Pionnières, une journée thématique autour de l'appropriation des outils numériques par des artistes et militantes. Il sera question d'édition collective et féministe de Wikipédia, avec Just for the Record, ou encore d'initiation à la musique électronique et d'atelier de DJing avec Steph Wunderbar.


2. La carte blanche à la compagnie Paulette Godart, le projet théâtral de deux liégeoises qui a été choisi pour effectuer une résidence avec Voix de Femmes. Pendant le festival, les artistes proposent deux rencontres : la première autour de la littérature jeunesse, la seconde autour de la psychiatrie à partir de leur nouveau spectacle, Pepi.

3. Le ciné-concert d'ouverture, avec Christine Ott qui jouera des Ondes Martenot, un instrument électronique rare, dont les sonorités particulières accompagneront la projection du film Tabu (1931).

TABU avec Christine Ott © Jean-Pierre Rosenkranz
4. Le micro ouvert de slam, un projet fort porté par Lisette Lombé qui laisse la parole à celles qui le veulent. Avec une projection de "Libertés", un court-métrage réalisé par des membres de La Maison des Femmes d'Ici et d'Ailleurs.

5. La boum de clôture, où l'on dansera grâce à deux musiciennes complètement déjantées,
 Rebeka Warrior (aka la moitié de Sexy Sushi) et l'incroyablement baroque Mathilde Fernandez.



... et encore plein d'autres activités super, à découvrir en épluchant le programme.

On se retrouve là ? De nôtre coté, on vous fera vivre le festival en temps (presque) réel via nos réseaux et par nos mots, et puis aussi, grâce aux notes dessinées de Manka.
H-Â-T-E ! 



VOIX DE FEMMES
Du 16 au 29 octobre à Liège et Gand
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