Des Noirs, des Blancs, de l'amour et du scandale: 3 films à ne pas rater en salles


Tiens, ça fait longtemps que je n’ai plus donné quelques (humbles) conseils ciné ici. Pourtant 2019 a déjà son lot de bons titres dont certains sont encore à l’affiche : Une Affaire de famille (magnifique !); La Favorite (pour les fans du m’as-tu-vu Lanthimos), Glass, La Mule, Doubles Vies (c’est intello-français-bavard, mais très bien !) ; Werk Ohne Autor (attention, ça dure 3h00) ; Une Intime Conviction, ...


 Aujourd’hui, je me concentre sur trois films tous juste sortis de leur coquille :  

If Beale Street Could Talk *****

Résumé : Tish et Fonny s'aiment depuis l’enfance. C’est tout naturellement, au fil des ans, qu’ils tombent amoureux et, elle, enceinte. Jusque là, tout va bien, il sont heureux. Sauf que l’histoire se déroule dans les années 70, à Harlem, et que ces deux jeunes gens sont afro-américains. Autant dire que le racisme de l’époque ne tarde pas à gâcher la fête. Après avoir vexé un policier – blanc évidemment – Fonny est incarcéré pour un crime qu’il n’a pas commis. Avec l'aide de sa famille et d’un avocat, Tish, pleine de ce courage que seul l’amour peut vous inspirer, tente de prouver l’innocence de son fiancé. 


Comment ne pas se laisser charmer par l’esthétique irréprochable et le travail du son incroyable de Barry Jenkins ? Le réalisateur de Moonlight– Oscar du meilleur film en 2017 - réalise encore une fois l’un de ces films qui s’instillent dans l’imaginaire. C’est doux,  c’est sobre. Et pourtant il montre une violence et une injustice crasses. Dans Moonlight, la magie de l’amour ne constituait qu’un seul des chapitres, ici, il s’étend de la première à la dernière minute, ce qui atténue la force de choc mais harmonise l’ensemble, finalement suffisamment souvent secoué par des brèches d’agitations pour trouver le mordant dont il a besoin. Le film est une adaptation du roman de James Baldwin dont le réalisateur transpose la puissance sur grand écran. En choisissant de raconter cette histoire, expression de la condition afro américaine dans les années 70, et de le faire en 2019, Jenkins entre en résonance avec  l’Amérique de Trump, celle d’un président pour qui le mensonge fait force de loi.

Si Beale Street pouvait parler, drame de Barry Jenkins
 Durée : 1h59

si Beale street pouvait parler

Green Book *****

Résumé :Le canevas, inspiré d’une de ces histoires vraies qu’affectionne Hollywood, est pour le moins classique. 1962 : Tony Lip, videur italo-américain bourru et raciste, est engagé pour conduire Don Shirley, pianiste afro-américain de renommée mondiale, lors d’une tournée dans le Sud du pays, où s’appliquent les lois de ségrégation raciale. Le « Green Book » est ainsi l’ouvrage qui recensait les établissements où les personnes de couleur étaient acceptées. Ce récit sur la ségrégation est assorti de considérations sociales: riche, renommé, Don est stigmatisé par les lois de l’Amérique blanche, mais aussi rejeté par les Afro-Américains dont il n’épouse pas la condition, misérable le plus souvent.  


Qui l’eu cru ? Après quelques comédies d’anthologies (Dumb & Dumber, Mary à tout prix)et une période de vaches maigres, tant sur le plan artistique que commercial, que Peter Farrelly nous reviendrait pour toucher les plus prestigieuses compétitions ? Personne ne s’y attendait et pourtant, le réalisateur a déjà remporté le prix du public à Toronto et trois Golden Globes avec ce film réalisé pour la première fois sans son frère. Restent trois marqueurs essentiels du style Farrelly : l’humour, l’intelligence et le road movie. 

En vertu de quoi échappe-t-on, ici, à la plate reconstitution et au message adoucissant tant redoutés ? Grâce à un récit tout en ligne claire, celle d’un road-movie qui pour autant sait prendre des chemins de traverse ; grâce aussi à un propos certes didactique, mais jamais scolaire ; et à une façon plus fine qu’il n’y paraît d’envisager la défiance mutuelle, puis l’amitié naissante, entre deux hommes qu’à priori tout oppose. Grâce, enfin, à deux acteurs en état de grâce, Viggo Mortensen et Mahershala Ali (oscarisé en 2017 pour son rôle dans Moonlight). Sous ses allures banales de film exemplaire sur la réconciliation, Green Book se révèle  au contraire superbement drôle, doux et touchant.


Could You Ever Forgive Me *****

Résumé :Asociale, acariâtre, Lee Israël est une écrivaine reconnue pour ses biographies. Mais depuis quelques temps, son agent ne voit plus de potentiel juteux dans ses écrits. Il faut dire que si Lee Israël ne manque pas de talents, ses livres manquent de cancans. Ce qui blesse la cupidité de son éditrice. C’est pourquoi, en 1992, l’auteure se met à falsifier des lettres de célébrités décédées pour payer les soins de santé de son chat – qu’elle aime plus que les êtres humains - et de quoi mettre du beurre dans ses épinards. C’est là aussi qu’elle rencontre Jack Hock, un gentleman insolent et déraisonnable. De même trempe, ces deux là forment le couple d’amis le plus marginal et hilarant qui soit. 


Pour son deuxième long métrage (son premier, le très réussi The Diary Of A Teenage Girl, n’était sorti qu’en vidéo), la réalisatrice Marielle Heller Les mémoires inconvenables, piteuses et drôles de Lee Israël, dans lesquels elle confesse son destin de criminelle littéraire. Pour camper le rôle de l’écrivaine, Melissa McCarthy se surpasse et se distingue légitimement avec deux nominations aux Golden Globes et Oscars. 

Remarquable de bout en bout, Can You Ever Forgive Me ?démontre une nouvelle fois que la littérature peut faire mouche sur grand écran. Lorsqu’elle teinte les actions de son héroïne d’une dimension existentielle, la réalisatrice nous plonge dans un récit à double lecture. Car le film va bien au delà de l’angle voyeuriste ou du scandale mais il traite l’histoire en mettant le focus sur l’émotion réelle qui chamboule son personnage principal. Lee Israël admet avoir vécu dans l’anxiété pendant plusieurs mois moins par culpabilité que par peur d’être démasquée. Ses fausses lettres étaient brillantes et, pour une fois, elle pouvait être fière de son travail sans être critiquée. C’était une sorte de lâcheté et il lui aura fallu beaucoup de courage pour l’admettre. C’est à ce moment précis du film, quand il gagne en ambiguïté quant à la nature pernicieuse des lettres de Lee, qu’il acquiert toute son ampleur. 

melissa mc carthy

Bon à savoir : Actuellement, la cinéaste travaille avec Tom Hanks sur le biopic de Fred Rogers, animateur vedette des enfants des années 60 à 80 aux Etats-Unis. Inconnu en Belgique, il est une super star Outre Atlantique pour avoir  consacré sa carrière à encourager l’épanouissement des enfants, en leur apprenant que chacun peut être aimé pour son unicité…

Can You Ever Forgive Me, comédie dramatique de Marielle Heller 
Durée : 1h47

Texte: Astrid / Photos: DR

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